AT-26 LE CANTIQUE DES CANTIQUES

Chapitres : 13  4  5 

LE BIEN-AIMÉ. *

4 1 Que tu es belle, ma bien-aimée, que tu es belle ! Tes yeux sont des colombes, derrière ton voile ; * tes cheveux comme un troupeau de chèvres, ondulant sur les pentes du mont Galaad. 2 Tes dents, un troupeau de brebis à tondre qui remontent du bain. * Chacune a sa jumelle et nulle n’en est privée. 3 Tes lèvres, un fil d’écarlate, et tes discours sont ravissants. Tes joues, des moitiés de grenades, derrière ton voile.

4 Ton cou, la tour de David, bâtie par assises. Mille rondaches y sont suspendues, tous les boucliers des preux. 5 Tes deux seins, deux faons, jumeaux d’une gazelle, qui paissent parmi les lis. 6 Avant que souffle la brise du jour et que s’enfuient les ombres, j’irai à la montagne de la myrrhe, à la colline de l’encens. * 7 Tu es toute belle, ma bien-aimée, et sans tache aucune ! *

8 Viens * du Liban, ô fiancée, * viens du Liban, fais ton entrée. Abaisse tes regards, des cimes de l’Amana, des cimes du Sanir et de l’Hermon, repaire des lions, montagnes des léopards, * 9 Tu me fais perdre le sens, ma sœur, * ô fiancée, tu me fais perdre le sens par un seul de tes regards, par un anneau de ton collier !

10 Que ton amour a de charmes, ma sœur, ô fiancée. Que ton amour est délicieux, plus que le vin ! Et l’arôme de tes parfums, plus que tous les baumes ! 11 Tes lèvres, ô fiancée, distillent le miel vierge. Le miel et le lait sont sous ta langue ; et le parfum de tes vêtements est comme le parfum du Liban. *

12 Elle est un jardin bien clos, * ma sœur, ô fiancée ; un jardin * bien clos, une source scellée. 13 Tes jets font un verger * de grenadiers, avec les fruits les plus exquis : * 14 le nard et le safran, le roseau odorant et le cinnamome, avec tous les arbres à encens ; la myrrhe et l’aloès, avec les plus fins arômes. * 15 Source des jardins, puits d’eaux vives, ruissellement du Liban !

  • Vers 1. le bien aimé. Le petit poème de 4 1 7 est un éloge physique de la bien-aimée, qui sera partiellement repris en 6 5-7, il y en aura un autre en 7 2-10, et l’éloge physique du bien-aimé sera donné en 5 10-16. On peut se demander si le portrait de l’épouse parfaite en Pr 31 10-31 n’est pas la réaction d’un « sage » contre de telles compositions. Elles étaient répandues. La Genèse Apocryphe retrouvée à Qumrân insère en Gn 12 15 un éloge de la beauté de Sara, d’ailleurs assez plat ; les chants d’amour égyptiens contiennent des pièces analogues, et c’est l’un des genres classiques de la poésie arabe, le waçf, a « description ».
  • Vers 1 Le bien aimé. A les prendre à la lettre, ces descriptions traceraient une image grotesque de la bien-aimée ou du bien-aimé ; également invraisemblable est l’interprétation allégorique qui y lit des descriptions de la Terre Sainte et du Temple. En réalité, ces textes ne « décrivent » pas, ils alignent des métaphores empruntées à tout le domaine de la nature, physique, animale, végétale, qui traduisent, par l’intermédiaire d’impressions sensorielles, vue et odorat, les sentiments d’admiration, de joie et de plaisir qu’éveillé la présence de l’objet aimé.
  • Vers 1. ton voile. La fiancée était voilée quand on la présentait à son époux, Gn 24 65; 28 23-25.
  • Vers 2. du bain. Blanches comme des brebis qu’on a lavées avant la tonte.
  • Vers 6. de l’encens. Le v. est une reprise de 2 17, peut-être secondaire, appelée par les derniers mots du v. 5, semblables à la fin de 2 16.
  • Vers 7. aucune. Comparer l’éloge d’Absalom. 2 S 14 25. – La liturgie applique le v. à l’Immaculée Conception de Marie.
  • Vers 8. Viens. « Viens » ‘etî versions; Avec moi » hébr. De même au stique suivant.
  • Vers 8. Ô fiancée. La jeune fille est appelée la « fiancée » seulement dans ce poème de 4 8 – 5 1, où le mot revient six fois.
  • Vers 8. des léopards. La strophe est difficile à expliquer. C’est peut-être le fragment d’un poème plus long. Jointe aux strophes suivantes, qui lui sont rattachées par les mots clés « fiancée » (cinq fois) et « Liban », vv. 11, 15, elle pourrait être un appel à la bien-aimée de quitter un pays difficile et dangereux pour rejoindre le bien-aimé et devenir son «jardin », cf. 6 2.
  • Vers 9. ma sœur. Encore aux vv. 10, 12; 5 1. 2. L’expression est peut-être empruntée au vocabulaire des poésies d’amour égyptiennes, où elle est courante. Mais ces poésies emploient « frère » pour désigner le bien-aimé, ce que Ct ne fait jamais, cf. par contraste 8 1.
  • Vers 11. du Liban. Le bien-aimé est transporté par les regards de sa fiancée, v. 9, le goût de ses baisers, v. 11, le parfum de ses vêtements, vv. 10, 11. On peut citer des parallèles tirés des poésies égyptiennes ou arabes ; on en trouverait dans toutes les littératures.
  • Vers 12. bien clos. Comme le vignoble de 1 6; 2 15, le jardin avec sa source et sa flore choisie, un «paradis», v. 13, cf. On 2 9-10, est une image des attraits de la bien-aimée. Le thème de la « Belle Jardinière » ou du «Verger d’Amour» se retrouve dans la poésie égyptienne. Mais le jardin est clos, v. 12, jusqu’au moment où la fiancée l’ouvrira à son bien-aimé, v. 16. Pour les épousailles, 5 1, Comparer Pr 5 15-20 sur l’amour conjugal.
  • Vers 12. un jardin. «jardin » gan versions; « vague » gai bébr., toujours au pluriel ailleurs; c’est une simple faute de graphie.
  • Vers 13. un verger. En hébr. pardes, comme Qo 2 5; Ne 2 8, mot perse signifiant « parc », dont nous avons fait « paradis ».
  • Vers 13. exquis. L’hébr. ajoute : « des cyprès et des nards ».
  • Vers 14. fins arômes. Les plantes des vv. 13-14 ne peuvent pas vivre ensemble et, sauf le grenadier, ne poussent pas en Palestine. C’est un jardin imaginaire qui rassemble les aromates les plus rares, selon un thème fréquent de ces poèmes. 1 2-3, 12-14; 36;. Comparer la Sagesse dans Si 24 12-21.

LA BIEN-AIMÉE.

16 Lève-toi, aquilon, accours, autan ! Soufflez sur mon jardin, qu’il distille ses aromates ! Que mon bien-aimé entre dans son jardin, et qu’il en goûte les fruits délicieux !