AT-07 LES JUGES.

Chapitres : Pages : 1—  5  6  7 

5. GÉDÉON ET ABIMELEK *

A). VOCATION DE GÉDÉON

Israël opprimé par les Madianites.

 6 1 Les Israélites firent ce qui est mal aux yeux de Yahvé ; Yahvé les livra pendant sept ans aux mains de Madiân, 2 et la main de Madiân se fit lourde sur Israël. C’est pour échapper à Madiân que les Israélites utilisèrent les crevasses des montagnes, les cavernes et les refuges. 3 Chaque fois qu’Israël avait semé, alors Madiân montait, ainsi qu’Amaleq et les fils de l’Orient, * ils montaient contre Israël 4 et, campés sur sa terre, ils dévastaient les produits du sol jusqu’aux abords de Gaza. Ils ne laissaient à Israël aucun moyen de subsistance, ni une tête de petit bétail, ni un bœuf, ni un âne, 5 car ils arrivaient, eux, leurs troupeaux et leurs tentes, aussi nombreux que les sauterelles ; eux et leurs chameaux étaient innombrables et ils envahissaient le pays pour le ravager. 6 Ainsi Madiân réduisit Israël à une grande misère et les Israélites crièrent vers Yahvé.

  •                Titre. Gédéon et Abimélek. La longue histoire de Gédéon rassemble plusieurs traditions de la tribu de Manassé, que le rédacteur deutéronomiste du livre a déjà trouvées réunies et qu’il a retouchées. Certaines concernent les exploits militaires de Gédéon contre les Madianites, soit en territoire israélite, soit de l’autre côté du Jourdain. A cela s’ajoutent des récits cultuels : la légitimation d’un autel à Ophra, la destruction d’un autel de Baal, le signe de la toison. Ces récits sont importants pour comprendre la crise religieuse provoquée par la sédentarisation et l’influence du culte de Baal, et la crise politique qui se manifeste par l’offre de la royauté à Gédéon et l’expérience malheureuse d’Abimélek.
  •                Vers 3. fils de l’Orient. Les Madianites sont de grands nomades dont le foyer est le nord-est du Sinaï, cf. Ex 2 11+. Les Amalécites sont localisés surtout en Palestine du sud, mais leur nom peut être une désignation vague des peuplades nomades. Les fils de l’Orient sont les tribus du désert à l’est du Jourdain. – Ce récit fournit le premier témoignage historique d’un élevage intensif du chameau et de son utilisation pour les razzias.

Intervention d’un prophète. *

7 Lorsque les Israélites eurent crié vers Yahvé à cause de Madiân, 8 Yahvé envoya aux Israélites un prophète qui leur dit : « Ainsi parle Yahvé, Dieu d’Israël. C’est moi qui vous ai fait monter d’Égypte, et qui vous ai fait sortir d’une maison de servitude. 9 Je vous ai délivrés de la main des Égyptiens et de la main de tous ceux qui vous opprimaient. Je les ai chassés devant vous, je vous ai donné leur pays, 10 et je vous ai dit : « Je suis Yahvé votre Dieu. Vous ne craindrez pas les dieux des Amorites dont vous habitez le pays. » Mais vous n’avez pas écouté ma voix. »

  •             Titre Première intervention d’un prophète dans l’histoire d’Israël. Le passage est de la main du rédacteur deutéronomiste.

Apparition de l’Ange de Yahvé à Gédéon *

11 L’Ange de Yahvé vint et s’assit sous le térébinthe d’Ophra, * qui appartenait à Yoash d’Abiézer. Gédéon, son fils, battait le blé dans le pressoir pour le soustraire à Madiân, 12 et l’Ange de Yahvé lui apparut : « Yahvé avec toi, lui dit-il, vaillant guerrier ! » 13 Gédéon lui répondit : « Je t’en prie mon Seigneur ! Si Yahvé est avec nous, d’où vient tout ce qui nous arrive ? Où sont tous ces prodiges que nous racontent nos pères quand ils disent :  » Yahvé ne nous a-t-il pas fait monter d’Égypte ?  » Et maintenant Yahvé nous a abandonnés, il nous a livrés au pouvoir de Madiân… »

14 Alors Yahvé se tourna vers lui et lui dit : « Va avec la force qui t’anime et tu sauveras Israël de la main de Madiân. N’est-ce pas moi qui t’envoie ? » – 15 « Pardon, mon Seigneur ! lui répondit Gédéon, comment sauverais-je Israël ? Mon clan est le plus pauvre en Manassé et moi, je suis le dernier dans la maison de mon père. » 16 Yahvé lui répondit : « Je serai avec toi et tu battras Madiân comme si c’était un seul homme. » 17 Gédéon lui dit : « Si j’ai trouvé grâce à tes yeux, donne-moi un signe que c’est toi qui me parles. 18 Ne t’éloigne pas d’ici, je te prie, jusqu’à ce que je revienne vers toi. Je t’apporterai mon offrande et je la déposerai devant toi. » Et il répondit : « Je resterai jusqu’à ton retour. »

19 Gédéon s’en alla, il prépara un chevreau, et avec une mesure de farine il fit des pains sans levain. II mît la viande dans une corbeille et le jus dans un pot, puis il lui apporta le tout sous le térébinthe. Comme il s’approchait, 20 l’Ange de Yahvé lui dit : « Prends la viande et les pains sans levain, pose-les sur ce rocher et répands le jus. » Et Gédéon fit ainsi. 21 Alors l’Ange de Yahvé étendit l’extrémité du bâton qu’il tenait à la main et il toucha la viande et les pains sans levain. Le feu jaillit du roc, il dévora la viande et les pains sans levain, et l’Ange de Yahvé disparut à ses yeux. * 22Alors Gédéon vit que c’était l’Ange de Yahvé et il dit : « Hélas ! Mon Seigneur Yahvé ! C’est donc que j’ai vu l’Ange de Yahvé face à face ? » 23 Yahvé lui répondit : « Que la paix soit avec toi ! Ne crains rien : tu ne mourras pas. » 24 Gédéon éleva en cet endroit un autel à Yahvé et il le nomma Yahvé-Paix. Cet autel est encore aujourd’hui à Ophra d’Abiézer.

  •                Titre. Ce paragraphe additionne un récit de la vocation de Gédéon, qui se continue aux vv. 36-40, et un récit de fondation de sanctuaire, dans le type de ceux de la Genèse, avec une théophanie, un message de salut et l’inauguration du culte. L’Ange de Yahvé, v. 11, est désigné par le seul nom de Yahvé aux w. 14, 16 et 23. Au v. 22, Gédéon identifie Yahvé et son Ange, cf. Gn 16 7
  •                Vers 11. d’Ophra. Un arbre sacré, cf. 4 11 ; 9 37, etc.; Jos 24 26. La localisation de cet Ophra est inconnue.
  •                Vers 21. à ses yeux. Le repas que Gédéon avait préparé pour l’Ange de Yahvé – qu’il ait eu un caractère sacrificiel ou non – est transformé en holocauste par le feu divin (comparer le sacrifice de Manoah, 13 15-20). Le rocher est ainsi consacré et Gédéon y élève un autel, v. 24.

Gédéon contre Baal. *

23 II arriva que, pendant cette nuit-là, Yahvé dit à Gédéon : « Prends le taureau de ton père, le taureau de sept ans, * et tu démoliras l’autel de Baal qui appartient à ton père et tu couperas le pieu sacré qui est à côté. 26 Puis tu construiras à Yahvé ton Dieu, au sommet de ce lieu fort, un autel bien disposé. Tu prendras alors le taureau et tu le brûleras en holocauste sur le, bois du pieu sacré que tu auras coupé. » 27 Gédéon prit alors dix hommes parmi ses serviteurs et il fit comme Yahvé le lui avait ordonné. Seulement, comme il craignait trop sa famille et les gens de la ville pour le faire en plein jour, il le fit de nuit. 28 Le lendemain matin les gens de la ville se levèrent ; l’autel de Baal avait été détruit, le pieu sacré qui se dressait à côté avait été coupé, et le taureau avait été offert en holocauste sur l’autel qu’on venait de bâtir. 29 Ils se dirent alors les uns aux autres : « Qui a fait cela ? » Ils cherchèrent, s’informèrent et ils dirent : « C’est Gédéon fils de Yoash qui a fait cela. » 30 Les gens de la ville dirent alors à Yoash : « Fais sortir ton fils et qu’il meure, car il a détruit l’autel de Baal et coupé le pieu sacré qui se dressait à côté. » 31 Yoash répondit à tous ceux qui se tenaient près de lui : « Est-ce à vous de défendre Baal ? Est-ce à vous de lui venir en aide ? (Quiconque défend Baal, doit être mis à mort avant qu’il ne fasse jour.) S’il est dieu, qu’il se défende lui-même, puisque Gédéon a détruit son autel. » 32 Ce jour-là on donna à Gédéon le nom de Yerubbaal, * car, disait-on : « Que Baal s’en prenne à lui, puisqu’il a détruit son autel ! »

  •                Titre. Ce second récit cultuel, qui semble se rapporter au même sanctuaire que le précédent, a un autre caractère : ici le culte de Baal est remplacé, violemment, par celui de Yahvé.
  •                Vers 25. sept ans. L’hébr. a : « le taureau de ton père et un second taureau de sept ans », et aux vv. 26.28 : « le second taureau »; mais il n’y a qu’un sacrifice. Il est possible que les mots « et un taureau de sept ans » soient une précision qui a été comprise comme la mention d’une seconde victime, ce qui a provoqué le désordre du texte actuel.
  •                Vers 32. Yerubbaal. Le second nom de Gédéon, cf. 7 1, etc., est expliqué ici par une étymologie populaire. Originairement, le nom signifie au contraire : « Que Baal prenne parti pour, qu’il défende (le porteur du nom) ». – Un sanctuaire de Yahvé succède au sanctuaire cananéen.

L’appel aux armes.

33 Tout Madiân, Amaleq et les fils de l’Orient se réunirent et, ayant passé le Jourdain, ils vinrent camper dans la plaine de Yizréel. 34 L’esprit de Yahvé revêtit Gédéon, il sonna du cor et Abiézer se groupa derrière lui. 35 II envoya des messagers dans tout Manassé, qui se groupa aussi derrière lui, et il envoya des messagers dans Asher, dans Zabulon et dans Nephtali ; et ils montèrent à sa rencontre.

L’épreuve de la toison. *

36 Gédéon dit à Dieu : « Si vraiment tu veux délivrer Israël par ma main, comme tu l’as dit, 37 voici que j’étends sur l’aire une toison de laine : s’il y a de la rosée seulement sur la toison et que tout le sol reste sec, alors je saurai que tu délivreras Israël par ma main, comme tu l’as dit. » 38 Et il en fut ainsi. Gédéon se leva le lendemain de bon matin, il pressa la toison et, de la toison, il exprima la rosée, une pleine coupe d’eau. 39 Gédéon dit encore à Dieu : « Ne t’irrite pas contre moi si je parle encore une fois. Permets que je fasse une dernière fois l’épreuve de la toison : qu’il n’y ait de sec que la seule toison et qu’il y ait de la rosée sur tout le sol ! » 40 Et Dieu fit ainsi en cette nuit-là. La toison seule resta sèche et il y eut de la rosée sur tout le sol.

  •             Titre. C’est le signe demandé par Gédéon au v. 17. Comparer Ex 4 1 -7, où deux signes authentifient la mission de Moïse.

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