AT-20 Premier LIVRE DES MACCABEES

CHAPITRES : 1—  7  8  9 

Éloge des Romains. *

8 1 Or Judas entendit parler des Romains. Ils étaient, disait-on, puissants, bienveillants aussi envers tous ceux qui s’attachaient à leur cause, accordant leur amitié à quiconque s’adressait à eux. 2 (Leur puissance en effet était fort grande.) On lui raconta leurs guerres et les exploits qu’ils avaient accomplis chez les Gaulois, * comment ils s’étaient rendus maîtres de ce peuple et l’avaient soumis au tribut, 3 tout ce qu’ils avaient fait dans le pays d’Espagne pour s’emparer des mines d’argent et d’or qui s’y trouvaient, 4 comment ils avaient eu raison de tout ce pays grâce à leur esprit averti et à leur persévérance (car l’endroit était fort éloigné de chez eux) ; il en avait été de même des rois venus pour les attaquer des extrémités de la terre, ils les avaient écrasés, leur infligeant un grand désastre, tandis que les autres leur apportaient un tribut annuel ; 5 enfin ils avaient abattu par les armes Philippe, Persée, roi des Kitiens, et les autres qui s’étaient levés contre eux, et ils les avaient soumis. *

6 Antiochus le Grand, roi de l’Asie, qui s’était avancé pour les combattre avec cent vingt éléphants, de la cavalerie, des chars et une armée considérable, avait été entièrement défait par eux 7 et capturé vivant. * A lui et à ses successeurs sur le trône étaient imposés, à termes fixés, le paiement d’un lourd tribut et la livraison d’otages. 8 On lui enlevait le pays indien, la Médie, la Lydie et quelques-unes de ses plus belles provinces au profit du roi Eumène. 9 Ceux de la Grèce ayant formé le dessein d’aller les exterminer, 10 les Romains, l’ayant su, avaient envoyé contre eux un seul général ; ils leur firent une guerre où tombèrent un grand nombre de victimes, ils emmenèrent en captivité femmes et enfants, ils pillèrent leurs biens, assujettirent leur pays, détruisirent leurs forteresses et réduisirent leurs personnes en servitude comme elles le sont encore aujourd’hui. * 11 Quant aux autres royaumes et aux îles qui leur avaient résisté, les Romains les avaient détruits et asservis. 12 Mais à leurs amis et à ceux qui se reposent sur eux, ils ont gardé leur amitié. Ils ont assujetti les rois voisins et les rois éloignés, tous ceux qui entendent leur nom les redoutent. 13 Tous ceux à qui ils veulent prêter secours et conférer la royauté, règnent ; ils déposent au contraire qui il leur plaît : ils ont atteint une puissance considérable.

14 Malgré tout cela aucun d’entre eux n’a ceint le diadème ni revêtu la pourpre pour en tirer gloire. 15 Ils se sont créé un conseil où chaque jour délibèrent trois cent vingt membres continuellement occupés du peuple pour le maintenir en bon ordre. 16 Ils confient chaque année à un seul homme * le pouvoir et la domination sur tout leur empire : tous obéissent à ce seul homme sans qu’il y ait d’envie ou de jalousie parmi eux.

  • Titre. L’éloge des Romains introduit le traité conclu entre Judas et Rome, vv. 17s. Celle-ci soutenait volontiers les rebelles pour affaiblir les monarchies encore incomplètement soumises.
  • Vers 2. les Gaulois. Litt. « les Galates ». Il s’agit sans doute des Gaulois cisalpins, réduits en 222.
  • Vers 5. avaient soumis. Philippe, roi de Macédoine, fut battu en 197 à Cynoscéphales et son fils Persée en 168 à Pydna.
  • Vers 7. vivant. Défaite de Magnésie du Sipyle, en 189, suivie du très onéreux traité d’Apamée, cf. 2 M 3 1+.
  • Vers 10. aujourd’hui. Ces deux vv. ne peuvent guère viser que la défaite de la ligue achéenne, la destruction de Corinthe et la réduction de la Grèce en province romaine, en 146. L’auteur dépasse largement l’horizon de Judas.
  • Vers 16. seul homme. II y avait en réalité deux consuls, mais l’auteur ne connaît peut-être l’existence que du seul consul qui se trouvait chargé des affaires d’Orient.

Alliance des Juifs avec les Romains.

17 Ayant choisi Eupolème, fils de Jean, de la maison d’Akkôs, et Jason, fils d’Éléazar, Judas les envoya à Rome conclure avec les Romains amitié et alliance, * 18 et obtenir d’être délivrés du joug, car ils voyaient que la royauté des Grecs réduisait Israël en servitude. 19 Ils arrivèrent à Rome au bout d’un très long voyage et, entrés au Sénat, ils prirent la parole en ces termes : 20 « Judas, dit Maccabée, et ses frères avec le peuple juif nous ont envoyés vers vous pour conclure avec vous un traité d’alliance et de paix et pout être inscrits au nombre de vos alliés et de vos amis. » 21 La requête plut aux sénateurs. 22 Voici la copie de la lettre qu’ils gravèrent sur des tables de bronze et envoyèrent à Jérusalem pour y être chez les Juifs un document de paix et d’alliance :

23 « Prospérité aux Romains et à la nation des Juifs sur mer et sur terre à jamais ! Loin d’eux le glaive et l’ennemi ! 24 S’il arrive une guerre, à Rome d’abord, ou à quelqu’un de ses alliés sur toute l’étendue de sa domination, 25 la nation des Juifs combattra avec elle, suivant ce que lui dicteront les circonstances, de tout cœur ; 26 ils ne donneront aux adversaires et ne leur fourniront ni blé, ni armes, ni argent, ni vaisseaux : ainsi en a décidé Rome, et ils garderont leurs engagements sans recevoir de garantie. 27 De même, s’il arrive d’abord une guerre à la nation des Juifs, les Romains combattront avec elle de toute leur âme, suivant ce que leur dicteront les circonstances. 28 II ne sera donné aux assaillants ni blé, ni armes, ni argent, ni vaisseaux : ainsi en a décidé Rome, et ils garderont leurs engagements sans dol. 29 C’est en ces termes que les Romains ont conclu leur convention avec le peuple des Juifs. 30 Que si, dans la suite, les uns et les autres décident d’y ajouter ou en retrancher quelque chose, ils le feront à leur gré et ce qu’ils auront ajouté ou retranché sera obligatoire. *

31 Au sujet des maux que le roi Démétrius leur a causés, nous lui avons écrit en ces termes : « Pourquoi fais-tu peser ton joug sur les Juifs, nos amis alliés ? 32 Si donc ils t’accusent encore, nous soutiendrons leurs droits et nous te combattrons sur mer et sur terre. »

  • Vers 17. et alliance. Cette ambassade doit avoir eu lieu avant la mort de Nikanor (qui ne précède que de deux mois celle de Judas) : on est tenté de l’identifier avec celle que mentionne Josèphe pour l’année 161.
  • Vers 30. obligatoire. Ici s’achève le texte du traité, dont le style rappelle d’autres documents similaires. Le paragraphe suivant résume une réponse orale faite aux envoyés.