AT-19 LE LIVRE D’ESTHER

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LE LIVRE D’ESTHER

TABLE DES MATIèRES

  • Préliminaires
  • Songe de Mardochée. * (Chap. 1)
  • Complot contre le roi.
  • I. Assuérus et Vasthi
  • Festin d’Assuérus. (Chap. 1)
  • L’affaire Vasthi.
  • II. Mardochée et Esther
  • Esther devient reine. (Chap. 2)
  • Mardochée et Aman. (Chap. 3)
  • III. Les Juifs menacés
  • Décret d’extermination des Juifs.
  • Mardochée et Esther vont conjurer le péril. (Chap. 4)
  • Prière de Mardochée. *
  • Prière d’Esther.
  • Esther se présente au palais. (Chap. 5)
  • IV. Revanche des Juifs
  • Déconvenue d’Aman. * (Chap. 6)
  • Aman au banquet d’Esther. (Chap. 7)
  • La faveur royale passe aux Juifs. (Chap. 8)
  • Décret de réhabilitation.
  • Le grand jour des Purim. (Chap. 9)
  • V. La fête des Purim
  • Institution officielle de la fête des Purim.
  • Éloge de Mardochée. (Chap. 10)
  • Note sur la traduction grecque du livret. *

CHAPITRES : 1— 2 3 4 5 6 7 8 9 10

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Songe de Mardochée. *

1 1a La deuxième année du règne du grand roi Assuérus, * le premier jour de Nisan, un songe * vint à Mardochée, fils de Yaïr, fils de Shiméï, fils de Qish, de la tribu de Benjamin, 1b Juif établi à Suse * et personnage considérable comme attaché à la cour. 1c Il était du nombre des déportés que, de Jérusalem, le roi de Babylone, Nabuchodonosor, avait emmenés en captivité avec le roi de Juda, Jékonias. *

1d Or, voici quel fut ce songe. Cris et fracas, le tonnerre gronde, le sol tremble, bouleversement sur toute la terre. 1e Deux énormes dragons s’avancent, l’un et l’autre prêts au combat. Ils poussent un hurlement ; 1f il n’a pas plus tôt retenti que toutes les nations se préparent à la guerre contre le peuple des justes. 1s Jour de ténèbres et d’obscurité ! Tribulation, détresse, angoisse, épouvante fondent sur la terre. 1h Bouleversé de terreur devant les maux qui l’attendent, le peuple juste tout entier se prépare à périr et crie vers Dieu, 1i Or, à son cri, comme d’une petite source, naît un grand fleuve, des eaux débordantes. 1k La lumière se lève avec le soleil. Les humbles sont exaltés et dévorent les puissants. 1l A son réveil, Mardochée, devant ce songe et la pensée des desseins de Dieu, y porta toute son attention et, jusqu’à la nuit, s’efforça de multiples façons d’en pénétrer le sens.

  • Titre. Mardochée. En italiques, les passages que la version grecque ajoute au texte hébreu, additions que l’Église reconnaît comme inspirées. Saint Jérôme les a rejetées en appendice à sa version latine, 10 4s. Nous les replaçons selon la disposition du texte grec avec la numérotation de l’édition des LXX de Rahlfs. La numérotation de ces passages dans la Vulg. est donnée en marge.
  • Vers 1a. Assuérus. Assuérus, transcription latine et française de la forme hébraïque du nom perse Kshajarsha, en grec Xerxès, cf. Esd 4 6. Par confusion avec le nom de ses successeurs, le grec porte Artaxerxès.
  • Vers 1a. un songe. Le texte grec, qui rapporte seul ce songe, donne d’avance la trame du récit sous une forme ênîgmatique et apocalyptique (la clé sera donnée en 10 3a~k), et souligne ainsi l’intervention divine.
  • Vers 1b. à Suse. Ville située à l’est de Babylone, ancienne capitale d’Élam et résidence d’hiver des rois perses.
  • Vers 1c. Jékonias. La chronologie est très libre : la généalogie de Mardochée ne retient que quelques noms pour couvrir cinq ou six siècles. Lui-même est présenté à la fois comme un courtisan d’Assuérus (vers 480) et comme un déporté contemporain de Jékonias (= Joiakîn, vers 598).

Complot contre le roi.

1m Mardochée logeait à la cour avec Bigtân et Téresh, * deux eunuques du roi, gardes du palais. 1n Ayant eu vent de ce qu’ils machinaient et pénétré leurs desseins, il découvrit qu’ils s’apprêtaient à porter la main sur le roi Assuérus, et le mit au courant. 1o Le roi fit donner la question aux deux eunuques, et, sur leurs aveux, les envoya au supplice. 1p II fit ensuite consigner l’histoire dans ses Mémoires cependant que Mardochée, de son côté, la couchait aussi par écrit. 1q Puis le roi lui confia une fonction au palais et, pour le récompenser, le gratifia de présents. 1r Mais Aman, fils de Hamdata, l’Agagite, avait la faveur du roi, et, pour cette affaire des deux eunuques royaux, il médita de nuire à Mardochée.

Vers 1m. et Téresh. On unifie les noms propres qui ont des formes variables selon les textes.

I. Assuérus et Vasthi

Festin d’Assuérus.

1 1 C’était au temps d’Assuérus, cet Assuérus dont l’empire s’étendait de l’Inde à l’Éthiopie, soit sur cent vingt-sept provinces. 2 En ce temps-là, comme il siégeait sur son trône royal, à la citadelle de Suse, 3 la troisième année de son règne, il donna un banquet, présidé par lui, à tous ses grands officiers et serviteurs chefs de l’armée * des Perses et des Mèdes, nobles et gouverneurs de provinces. 4 II voulait étaler à leurs yeux la richesse et la magnificence de son royaume ainsi que l’éclat splendide de sa grandeur, pendant une longue suite de jours, exactement cent quatre-vingts.

5 Ce temps écoulé, ce fut alors toute la population de la citadelle de Suse, du plus grand au plus petit, qui se vit offrir par le roi un banquet de sept jours, sur l’esplanade du jardin du palais royal. 6 Ce n’étaient que tentures de toile blanche et de pourpre violette attachées par des cordons de byssus et de pourpre rouge, eux-mêmes suspendus à des anneaux d’argent fixés sur des colonnes de marbre blanc, lits d’or et d’argent posés sur un dallage de pierres rares, de marbre blanc, de nacre et de mosaïques ! 7 Pour boire, des coupes d’or, toutes différentes, et abondance de vin offert par le roi avec une libéralité royale. 8 Le décret royal toutefois ne contraignait pas à boire, le roi ayant prescrit à tous les officiers de sa maison que chacun fût traité comme il l’entendait.

Vers 3. de l’armée. «chefs de l’armée» conj.; «l’armée» hébr. – Les «serviteurs » sont ici les hauts fonctionnaires. De tels banquets étaient fréquents, cf. Gn 40 20; 1 R 3 15; Dn 5 1; Mc 6 21.

L’affaire Vasthi.

9 La reine Vasthi, * de son côté, avait offert aux femmes un festin dans le palais royal d’Assuérus.

10 Le septième jour, mis en gaîté par le vin, le roi ordonna à Mehumân, à Bizzeta, à Harbona, à Bigta, à Abgata, à Zétar et à Karkas, les sept eunuques attachés au service personnel du roi Assuérus, 11 de lui amener la reine Vasthi coiffée du diadème royal, en vue de faire montre de sa beauté au peuple et aux grands officiers. Le fait est qu’elle était très belle. 12 Mais la reine Vasthi refusa de venir selon l’ordre du roi que les eunuques lui avaient transmis. L’irritation du roi fut extrême et sa colère s’enflamma. 13 II s’adressa aux sages versés dans la science des lois * – car c’est ainsi que les affaires du roi étaient traitées, en présence de tous ceux qui étaient versés dans la science de la loi et du droit. 14 II fit venir près de lui Karshena, Shétar, Admata, Tarshish, Mères, Marsena et Memukân, sept grands officiers perses et mèdes admis à voir la face du roi * et siégeant aux premières places du royaume. 15 « Selon la loi, dit-il, que faut-il faire à la reine Vasthi pour n’avoir pas obtempéré à l’ordre du roi Assuérus que les eunuques lui transmettaient ? » 16 Et en présence du roi et des grands officiers Memukân répondit : « Ce n’est pas seulement contre le roi que la reine Vasthi a mal agi, c’est aussi contre tous les grands officiers et contre toutes les populations répandues à travers les provinces du roi Assuérus. 17 La façon d’agir de la reine ne manquera pas de venir à la connaissance de toutes les femmes, qui regarderont leur mari avec mépris. » « Le roi Assuérus lui-même, pourront-elles dire, avait donné l’ordre de lui amener la reine Vasthi, et elle n’est pas venue ! » 18 Aujourd’hui même les femmes des grands officiers perses et mèdes vont parler à tous les grands officiers du roi de ce qu’elles ont appris de la façon d’agir de la reine, et ce sera grand mépris et grande colère. 19 Si tel est le bon plaisir du roi, qu’un édit émané de lui s’inscrive, irrévocable, * parmi les lois des Perses et des Mèdes, pour interdire à Vasthi de paraître en présence du roi Assuérus, et que le roi confère sa qualité de reine à une autre qui vaille mieux qu’elle. 20 Puis l’ordonnance portée par le roi sera promulguée dans tout son royaume, qui est grand, et lors les femmes rendront honneur à leur mari, du plus grand jusqu’au plus humble. »

21 Ce discours plut au roi et aux grands officiers, et le roi suivit l’avis de Memukân. 22 II envoya des lettres à toutes les provinces de l’empire, à chaque province selon son écriture et à chaque peuple selon sa langue, afin que tout mari fût maître chez lui. *

  • Vers 9. Vasthi. Vasthi, comme Esther, est inconnue de l’histoire.
  • Vers 13. des lois. « la science des lois » conj.; « la science des temps » hébr.
  • Vers 14. face du roi. C’est-à-dire admis au conseil royal, cf. 2 R 25 19. – Cette consultation de sages est également attestée en Dn 2 2s; 5 7-12.
  • Vers 19. irrévocable. Le thème de l’édit irrévocable, et bientôt caduc, est très exploité dans la littérature biblique d’inspiration perse, peut-être avec une subtile ironie de l’écrivain juif.
  • Vers 22. chez lui. Hébr. ajoute : « et qu’il parle la langue de son peuple », omis par grec.