AT-09 1er LIVRE DE SAMUEL

CHAPITRES : 1—  12 13  14  15 16

Jonathan attaque le poste.

14   1 Un jour le fils de Saül, Jonathan, dit à son écuyer : « Viens, traversons jusqu’au poste des Philistins qui sont de l’autre côté, » mais il n’avertit pas son père. 2 Saül était assis à la limite de Géba, sous le grenadier qui est près de l’aire, et la troupe qui était avec lui était d’environ six cents hommes. 3 Ahiyya, fils d’Ahitub, frère d’Ikabod, fils de Pinhas, fils d’Éli, le prêtre de Yahvé à Silo, portait l’éphod. La troupe ne remarqua pas que Jonathan était parti.

4 Dans le défilé que Jonathan cherchait à franchir pour atteindre le poste philistin, il y a une dent de rocher d’un côté et une dent de rocher de l’autre côté. L’une est appelée Boçèç, et l’autre Senne ; 5 la première dent est au nord, face à Mikmas, la seconde est au sud, face à Géba. 6 Jonathan dit à son écuyer : « Viens, traversons jusqu’au poste de ces incirconcis. Peut-être Yahvé fera-t-il quelque chose pour nous, car rien n’empêche Yahvé de donner la victoire, qu’on soit beaucoup ou peu. » Son écuyer lui répondit : « Fais tout ce vers quoi penche ton cœur. Je suis avec toi, mon cœur est comme ton cœur. » * 8 Jonathan dit : « Voici que nous allons passer vers ces gens et nous découvrir à eux. 9 S’ils nous disent :  » Ne bougez pas jusqu’à ce que nous vous rejoignions,  » nous resterons sur place et nous ne monterons pas vers eux. 10 Mais s’ils nous disent :  » Montez vers nous,  » nous monterons, car Yahvé les aura livrés entre nos mains : cela nous servira de signe. » *

11 Lorsqu’ils se découvrirent tous les deux au poste des Philistins, ceux-ci dirent : « Voilà des Hébreux qui sortent des trous où ils se cachaient, » 12 et les gens du poste, s’adressant à Jonathan et à son écuyer, dirent : « Montez vers nous, que nous vous apprenions quelque chose. » Alors Jonathan dit à son écuyer : « Monte derrière moi, car Yahvé les a livrés aux mains d’Israël. » 13 Jonathan monta en s’aidant des mains et des pieds, et son écuyer le suivit ; ils tombaient devant Jonathan et son écuyer les achevait derrière lui. 14 Ce premier massacre que firent Jonathan et son écuyer fut d’une vingtaine d’hommes.

  •                Vers 7. ton cœur. « mon cœur est » grec ; « avec toi » hébr.
  •                Vers 10. de signe. C’est l’événement, proche ou lointain, qui manifeste la volonté divine. Il est annoncé par Dieu, Ex 3 12, ou par un homme de Dieu, 1 S 2 34; 10 7-9 ; 2 R 19 29, ou enfin, comme ici et Gn 24 12s ; Jg 6 17-18 et 36-40 ; 2 R 20 8-10, il est proposé par le sujet même, pour solliciter la réponse de Dieu.

Bataille générale.

15 La terreur se répandit dans le camp, dans la campagne et dans tout le peuple ; le poste et le corps de destruction furent saisis d’effroi eux aussi, la terre trembla et ce fut une panique de Dieu. 16 Les guetteurs de Saül, qui étaient à Géba * de Benjamin, virent que le camp s’agitait en tous sens, 17 et Saül dit à la troupe qui était avec lui : « Faites l’appel et voyez qui d’entre nous est parti. » On fit l’appel et voilà que Jonathan et son écuyer étaient absents !

18 Alors Saül dit à Ahiyya : « Apporte l’éphod », car c’était lui qui portait l’éphod en présence d’Israël. * 19 Mais pendant que Saül parlait au prêtre, le tumulte au camp philistin allait croissant et Saül dit au prêtre : « Retire ta main. » * 20 Saül et toute la troupe qui était avec lui se réunirent et arrivèrent au lieu du combat : voilà qu’ils tiraient l’épée les uns contre les autres, une énorme panique ! 21 Les Hébreux qui s’étaient mis auparavant au service des Philistins et qui étaient montés avec eux au camp firent défection eux aussi, * pour se joindre aux Israélites qui étaient avec Saül et Jonathan. 22 Tous les Israélites qui s’étaient cachés dans la montagne d’Éphraïm, apprenant que les Philistins étaient en fuite, les talonnèrent aussi, en combattant. 23 Ce jour-là Yahvé donna la victoire à Israël.

  •                Vers 16. Géba. « Géba » cf. 13 16 ; « Gibéa » hébr. – « le camp » grec ; « le tumulte » hébr. On suit le grec ; hébr. a : «  » Apporte l’arche de Dieu « . Car l’arche de Dieu était alors chez les Israélites. »
  •                Vers 18. d’Israël.  Sur l’éphod divinatoire, cf. 2 28+. Saül veut consulter Dieu avant d’engager le combat, cf. 30 7s et ici le v. 37. Mais un scribe tardif, pensant à Jg 8 27, où l’éphod est un objet de scandale, a corrige ici en « arche de Dieu ».
  •                Vers 19. ta main. Le prêtre va tirer les sorts ; Saül l’arrête et, sans plus consulter, marche au combat.
  •                Vers 21. eux aussi. « firent défection eux aussi » grec ; hébr. corrompu.

Une Interdiction de Saül violée par Jonathan. *

Le combat s’étendit au-delà de Bet-Horôn. * 24 Comme les gens d’Israël étaient serrés de près ce jour-là, Saül prononça sur le peuple cette imprécation : « Maudit soit l’homme qui mangera quelque chose avant le soir, avant que j’aie tiré vengeance de mes ennemis ! » Et personne du peuple ne goûta d’aucune nourriture. *

25 Or il y avait un rayon de miel en plein champ. * 26Le peuple arriva au rayon de miel et le miel coulait, mais personne ne porta la main à sa bouche, car le peuple redoutait le serment juré. 27 Cependant Jonathan n’avait pas entendu son père imposer le serment au peuple. Il avança le bout du bâton qu’il avait à la main et le plongea dans le rayon de miel, puis il ramena la main à sa bouche ; alors ses yeux s’éclaircirent. 28 Mais quelqu’un de la troupe prit la parole et dit : « Ton père a imposé ce serment au peuple :  » Maudit soit l’homme, a-t-il dit, qui mangera quelque chose aujourd’hui » ». * 29 Jonathan répondit : « Mon père a fait le malheur du pays ! Voyez donc comme j’ai les yeux plus clairs pour avoir goûté ce peu de miel. 30 A plus forte raison, si le peuple avait mangé aujourd’hui du butin qu’il a trouvé chez l’ennemi, est-ce qu’alors la défaite des Philistins n’aurait pas été plus grande ? »

  •                Titre. Deux traditions sont mêlées. 1° Saül a ordonné un jeûne jusqu’au soir, v. 24, le peuple l’observe puis se jette sur le butin sans observer les prescriptions rituelles, vv. 31-35. 2° Saül ordonne un jeûne, v. 24 ; Jonathan, ignorant l’interdit, le transgresse, vv. 25-30, il est désigné comme coupable par le sort, vv. 36-46.
  •                Vers 23. Bet-Horôn. « Bet-Horôn » versions ; « Bet-Avèn » hébr.
  •                Vers 24. Nourriture. Ce jeûne de circonstance est un moyen d’obtenir la victoire, qui est donnée par Dieu.
  •                Vers 25. plein champ. Restitué par conjecture ; on supprime les premiers mots du v. qui sont un doublet maladroit du v. suivant.
  •                Vers 28. aujourd’hui. Le texte ajoute ; « et le peuple était à bout de forces », glose tirée du v. 31.

Faute rituelle du peuple.

31 Ce jour-là, on battit les Philistins depuis Mikmas jusqu’à Ayyalôn * et le peuple était à bout de force. 32 Alors le peuple se rua sur le butin, il prit du petit bétail, des bœufs, des veaux, les immola à même la terre et il se mit à manger avec le sang. 33 On avertit ainsi Saül : « Le peuple est en train de pécher contre Yahvé en mangeant avec le sang ! » Alors il dit : « Vous avez été infidèles ! Roulez-moi ici une grande pierre ! » * 34 Puis Saül dit : « Répandez-vous dans le peuple et dites :  » Que chacun m’amène son bœuf ou son mouton  » ; vous les immolerez ici et vous mangerez, sans pécher contre Yahvé en mangeant avec le sang. » Les hommes amenèrent chacun ce qu’il avait cette nuit-là * et ils firent l’immolation en cet endroit. 35 Saül construisit un autel à Yahvé ; ce fut le premier autel qu’il lui construisit.

  •                Vers 31. Ayyalôn. Les Philistins sont refoulés par leur route ordinaire d’invasion. C’est vraiment une grande victoire : la montagne, cœur du royaume, est libérée.
  •                Vers 33. grande pierre. Cette pierre va servir d’autel, cf. 6 14 ; Jg 6 20 ; 13 19. pour faire de l’abattage une immolation rituelle, cf. Lv 17 1+
  •                Vers 34. cette nuit-là. « ce qu’il avait », litt. ; « ce qui était dans sa main », grec. ; « son bœuf dans sa main » hébr.

Jonathan reconnu coupable est sauvé par le peuple.

36 Saül dit : « Descendons de nuit à la poursuite des Philistins et pillons-les jusqu’au lever du jour ; nous ne leur laisserons pas un homme. » On lui répondit : « Fais tout ce qui te semble bon. » Mais le prêtre dit : « Approchons-nous ici de Dieu. » * 37 Saül consulta Dieu : « Descendrai-je à la poursuite des Philistins ? Les livreras-tu entre les mains d’Israël ? » Mais il ne lui répondit pas ce jour-là.

38 Alors, Saül dit : « Approchez ici, vous tous, chefs du peuple ! Examinez bien en quoi a consisté la faute d’aujourd’hui. 39 Aussi vrai que vit Yahvé qui donne la victoire à Israël, même s’il s’agit de mon fils Jonathan, il mourra sûrement ! » Personne dans tout le peuple n’osa lui répondre. 40 II dit à tout Israël : « Mettez-vous d’un côté et moi avec mon fils Jonathan nous nous mettrons de l’autre », et le peuple répondit à Saül : « Fais ce qui te semble bon. »

41 Saül dit alors : « Yahvé, Dieu d’Israël, pourquoi n’as-tu pas répondu aujourd’hui à ton serviteur ? Si la faute est sur moi ou sur mon fils Jonathan, Yahvé, Dieu d’Israël, donne urim ! Si la faute est sur ton peuple Israël, donne tummim. » * Saül et Jonathan furent désignés et le peuple échappa. 42 Saül dit : « Jetez le sort entre moi et mon fils Jonathan », et Jonathan fut désigné. 43 Alors Saül dit à Jonathan : « Avoue-moi ce que tu as fait. » Jonathan répondit : « J’ai seulement goûté un peu de miel avec le bout du bâton que j’avais à la main. Je suis prêt à mourir. » 44 Saül reprit : « Que Dieu me fasse ce mal et qu’il ajoute cet autre si tu ne meurs pas, Jonathan ! »

45 Mais le peuple dit à Saül : « Est-ce que Jonathan va mourir, lui qui a opéré cette grande victoire en Israël ? Gardons-nous-en ! Aussi vrai que Yahvé est vivant, il ne tombera pas à terre un cheveu de sa tête, car c’est avec Dieu qu’il a agi aujourd’hui ! » Ainsi le peuple racheta * Jonathan et il ne mourut pas. 46 Saül renonça à poursuivre les Philistins et les Philistins gagnèrent leur pays.

  •             Vers 36. de Dieu. Pour le consulter par l’éphod, cf. 30 8 et ci-dessus, v. 18.
  •                Vers 41. tummim. Ce v., restitué d’après les versions (l’hébr. est corrompu et saute du 1er « Israël » au 3°), montre comment on consultait par l’éphod : il contenait deux sorts (bâtonnets ou dés ?) qu’on appelait urim et tummim (la valeur des mots est incertaine) et auxquels on donnait une signification conventionnelle. Celui qui était tiré apportait la réponse divine. C’était donc une réponse par oui ou par non, cf. 23 10-12, et la consultation était parfois longue. Le maniement des sorts était réservé aux prêtres lévites, Nb 27 21 ; Dt 33 8. L’usage tomba en désuétude après le règne de David et ne fut pas rétabli, cf. Esd 2 63 = Ne 7 65. Mais le nom resta attaché à un détail du costume du grand prêtre, cf. Ex 28 30 ; Lv 8 8 et Ex 28 6+.
  •                Vers 45. racheta. comme on rachetait une victime due à Yahvé, Ex 13 13-15 ; 34 20 ; Lv 27 27.

Résumé du règne de Saül. *

47 Saül s’assura la royauté sur Israël et fit la guerre de tous côtés contre tous ses ennemis, contre Moab, les Ammonites, Édom, le roi de Çoba et les Philistins ; où qu’il se tournât, il était victorieux. * 48 II fit des prouesses de vaillance, battit les Amalécites et délivra Israël des mains de ceux qui le pillaient.

49 Saül eut pour fils Jonathan, Ishyo * et Malki-Shua. Les noms de ses deux filles étaient Mérab pour l’aînée et Mikal pour la cadette. 50 La femme de Saül se nommait Ahinoam, fille d’Ahimaaç. Le chef de son armée se nommait Abner, fils de Ner, l’oncle de Saül : 51 Qish, le père de Saül, et Ner, le père d’Abner, étaient les fils d’Abiel. 52 II y eut une guerre acharnée contre les Philistins tant que vécut Saül. Tous les braves et tous les vaillants que voyait Saül, il se les attachait. *

  •                Titre. Sommaire analogue à 7 13-15 (Samuel) et 2 S 8 (David). Cf. aussi 2 S 3 2-5 ; 5 13-16 ; 20 23-26.
  •                Vers 47. victorieux. « il était victorieux » versions.; « il faisait le mal » hébr.
  •                Vers 49. Ishyo. C’est-à-dire « l’homme de Yahvé ». C’est le même personnage qui est appelé Ishbaal, « l’homme du Maître » en 1 Ch 8 33, et Ishboshet, « l’homme de honte » dans l’hébr. de 2 S 2 8, etc., où « honte » remplace « Baal », nom du Dieu cananéen.
  •                Vers 52. attachait. Début d’une armée de métier différente du ban ou levée en masse du peuple.