AT-25 L’ECCLÉSIASTE (Qohélet)

Chapitres : 1—   11 12-

12 * 1 Et souviens-toi de ton Créateur aux jours de ton adolescence, avant que viennent les jours mauvais et qu’arrivent les années dont tu diras : « Je ne les aime pas » ; 2 avant que s’obscurcissent le soleil et la lumière, la lune et les étoiles, et que reviennent les nuages après la pluie ;

3 au jour où tremblent les gardiens de la maison, où se courbent les hommes vigoureux, où les femmes, l’une après l’autre, cessent de moudre, * où l’obscurité gagne celles qui regardent par la fenêtre. 4 Quand la porte est fermée sur la rue, quand tombe la voix du moulin, quand on se lève à la voix de l’oiseau, quand se taisent toutes les chansons. *

5 Quand on redoute la montée et qu’on a des frayeurs en chemin. Et l’amandier est en fleur, et la sauterelle est pesante, et la câpre perd son goût. * Tandis que l’homme s’en va vers sa maison d’éternité et les pleureurs tournent déjà dans la rue.

6 Avant que lâche le fil d’argent, * que la coupe d’or se brise, que la jarre se casse à la fontaine, que la poulie se rompe au puits 7 et que la poussière retourne à la terre comme elle en est venue, et le souffle à Dieu qui l’a donné. * 8 Vanité des vanités, dit Qohélet, tout est vanité. *

  • Titre. L’âge. La longévité était la récompense promise aux Israélites dans les discours du Deutéronome, Dt 5 16, 33; 11 9, 21; 22 7, etc., la suprême béatitude garantie au juste par les Sages. Pour Qohélet, la vieillesse n’est pas le bonheur, c’est la peur de la mort, 11 7, le regret de la jeunesse, 11 8 ; 12 2, la vie au ralenti, 12 3-5, l’attente de l’irréparable, 12 5-7.
  • Vers 9. de tes yeux. Litt. « ce que voient tes yeux ». – On a peut-être là un dicton sur la jeunesse, que Qohélet reprend mais en y ajoutant un prudent rappel de sa brièveté.
  • Chap 12. Ce très beau poème, plein d’émotion et de nostalgie, évoque la vieillesse de façon plus ou moins métaphorique ; mais il est parfois difficile de saisir la portée exacte de ces métaphores. Avec un courant d’interprétation rabbinique, on a parfois voulu y lire l’évocation des diverses parties du corps (cf. surtout v. 3, les bras, les dents et les yeux); mais cette interprétation physiologique ne s’impose pas. On peut y voir aussi la description de la vieillesse comme de l’hiver de la vie, mais un hiver qui, à la différence de celui de la nature, ne cède plus la place à aucun printemps.
  • Vers 3. de moudre. « les femmes », litt. « celles qui moulent ». – « l’une après l’autre » ou « (parce qu’elles sont) trop peu nombreuses ».
  • Vers 4. les chansons. «se taisent» weyeheshû conj.; h sont humiliés» weyishahû hébr. – L’allusion au sommeil léger du vieillard (stique précédent) semble hors de contexte; on a parfois proposé de corriger « on se lève » wayyaqûm en « on s’arrête » weyiddôm, mais les versions (sauf Symmaque) sont en faveur du TM.
  • Vers 5. son goût. « perd son goût », traduction incertaine, en lisant un passif (wetuppar) au lieu de la forme wetaper non attestée. On peut aussi comprendre « est sans effet ». On corrige parfois en wetipereh : « donne son fruit », ce qui continue l’image du retour de la belle saison : la vie va quitter l’homme au moment même où la nature ressuscite. La sauterelle est pesante », soit parce qu’elle est repue (encore une image du printemps), soit au contraire parce que le moindre poids est une charge pour le vieillard.
  • Vers 6. d’argent. « lâche » yinnateq conj. d’après syr. et Sym.; « soit écartée » yeraheq hébr.
  • Vers 7. l’a donné. Ce qui dans l’homme est de la terre y retourne. Mais comme rien ici-bas ne peut le satisfaire, tout en lui ne vient pas de la terre, et ce qui est de Dieu retourne à Dieu.
  • Vers 8. vanité. Le livre se termine comme il avait commencé, mais on mesure le chemin parcouru. Il a appris à l’homme sa misère, mais aussi sa grandeur, en lui montrant que ce monde n’est pas digne de lui. Il le provoque à une religion désintéressée, à une prière qui soit l’adoration de la créature consciente de son néant en présence du mystère de Dieu. Cf. le Ps 39.

Épilogue. *

9 Sans compter que Qohélet fut un sage, il a encore enseigné au peuple le savoir ; il a pesé, examiné et corrigé beaucoup de proverbes ; 10 Qohélet s’est efforcé de trouver beaucoup de paroles plaisantes et d’écrire des paroles de vérité.

11 Les paroles du sage sont comme des aiguillons et comme des piquets plantés par les maîtres de troupeaux ; ils sont mis par le même pasteur. * 12 En plus de cela, mon fils, sois averti que faire des livres est un travail sans fin et que beaucoup d’étude fatigue le corps.

13 Fin du discours. Tout est entendu. Crains Dieu et observe ses commandements, car c’est là le devoir de tout homme. * 14 Car Dieu amènera en jugement toutes les actions de l’homme, tout ce qui est caché, que ce soit bien ou mal.

  • Titre. Cet appendice n’est pas de la même main que le reste du livre. Il peut être l’œuvre d’un disciple de Qohélet, qui fait son éloge, en restant dans le même ton (cf. w. 12-14)
  • Vers 1. pasteur. L’aiguillon pour pousser les bêtes à avancer, et les piquets pour les maintenir à l’attache, sont utilisés, chacun en temps voulu, par le pasteur, non pas selon son caprice mais pour le bien du troupeau. L’image du pasteur pourrait être une métaphore faisant allusion, selon certains, à Moïse, selon d’autres à Salomon ou à Dieu. Mais le teste est peut-être corrompu (on restitue « par », peut-être tombé par haplographie).
  • Vers 13. tout homme. « le devoir » conj.; omis par hébr.

Fin du livre de l’Ecclésiaste.