AT-27 LE LIVRE DE LA SAGESSE

Chapitres /  Pages : 1—  10  11  12 

 11 1 Elle fit prospérer leurs entreprises par la main d’un saint prophète. * 2 Ils traversèrent un désert inhabité et plantèrent leurs tentes en des lieux inaccessibles. 3 Ils tinrent tête à leurs ennemis et repoussèrent leurs adversaires. *

  • – Verset 15. irréprochable. Le peuple de l’Exode est « saint » et « irréprochable » en raison de sa vocation, Ex 19 6; Lv 19 2, et des valeurs religieuses qu’il incarne. En même temps l’auteur idéalise le passé et continuera de le faire dans la troisième partie ; son but est triple : illustrer par l’histoire le traitement différent des justes et des impies, exalter la supériorité religieuse et morale du judaïsme, enfin montrer que le passé préfigure le futur apocalyptique.
  • – Verset 16. redoutable. Généralisation oratoire : il s’agit du Pharaon.
  • – Verset 17. la nuit. L’auteur attribue à la Sagesse ce qu’Ex dit de Dieu présent dans la Nuée.
  • – Verset 20. les impies. Selon la tradition juive, les Israélites dépouillèrent de leurs armes les Égyptiens morts.
  • – Verset 21. tout-petits. Jadis Dieu avait délié la langue de Moïse pour parler à Pharaon. Ex 4 10; 6 12, 30. Cette fois il intervient pour que tous les Israélites sans exception puissent s’associer à sa louange. L’auteur suit ici une tradition juive qui va s’amplifiant dans les textes rabbiniques.
  • – Verset 1. saint prophète.  Moïse, cf. Nb 12 7+; Dt 18 15.
  • – Verset 3. leurs adversaires. La longue marche au désert est résumée en quelques phrases pour préparer un développement distinct. La sagesse n’est plus mentionnée, sauf 14 2, 5 et l’auteur s’adresse à Dieu dans une sorte de méditation sur les événements de l’Exode. Il va opposer constamment, mais avec de longues digressions (12 2-22; 13 1-15), le traitement des Israélites considérés comme un peuple de justes, cf. 10 15, et celui des Égyptiens, devenus le symbole de l’endurcissement des impies. Par ses libertés à l’égard des sources bibliques antérieures, tout ce développement s’apparente au midrash ou commentaire rabbinique de l’Écriture.

Le miracle de l’eau. Première antithèse. *

4 Dans leur soif, ils t’invoquèrent : de l’eau leur fut donnée d’un rocher escarpé et, d’une pierre dure, un remède à leur soif. 5 Ainsi ce par quoi avaient été châtiés leurs ennemis devint un bienfait pour eux dans leurs difficultés, 6 Tandis que les premiers n’avaient que la source intarissable d’un fleuve que troublait un sang mêlé de boue, 7 en punition d’un décret infanticide. *

Tu donnas aux tiens, contre tout espoir, une eau abondante, 8 montrant par la soif qu’alors ils ressentirent comment tu avais châtié leurs adversaires. 9 Par leurs épreuves, qui n’étaient pourtant qu’une correction de miséricorde, ils comprirent comment un jugement de colère torturait les impies ; * 10 car eux, tu les avais éprouvés en père qui avertit, mais ceux-là, tu les avais punis en roi inexorable qui condamne, 11 et de loin comme de près, ils se consumaient pareillement.

12 Car une double tristesse les saisit, et un gémissement, au souvenir du passé ; * 13 lorsqu’ils apprirent, en effet, que cela même qui les châtiait était un bienfait pour les autres, * ils reconnurent le Seigneur, * 14 car celui que jadis ils avaient fait exposer, puis repoussé avec dérision, * ils l’admirèrent au terme des événements, ayant souffert d’une soif bien différente de celle des justes.

  • – Titre. À propos du miracle de l’eau au désert, l’auteur va mettre en œuvre une comparaison complexe dont le principe est posé au v. 5. En même temps il s’attache à justifier les châtiments correspondants d’après une sorte de « talion divin » énoncé au v. 16. D’autres antithèses suivront plus loin, cf. 16 1, 5. 15; 17 1; 18 5; 19 1, mais on ne s’accorde pas sur leur chiffre précis et il est souvent difficile de les délimiter exactement.
  • – Verset 7. l’infanticide. Selon Ex 7 14-25, c’est pour contraindre Pharaon à laisser partir les Israélites que Yahvé changea les eaux du Nil en sang. L’auteur fait ici de ce miracle le châtiment du décret de Ex 1 15s.
  • – Verset 9. les impies. La soif, et peut-être aussi les autres souffrances que les Israélites endurèrent au désert devaient leur faire comprendre le châtiment des Égyptiens.
  • – Verset 12. du passé. « au souvenir du passé » corr. d’après certains mss; « des souvenirs passés » texte reçu.
  • – Verset 13. les autres. L’’eau retirée aux Égyptiens, miraculeusement donnée aux Israélites, 11 4.
  • – Verset 13. le Seigneur. De nombreux mss latins ajoutent ici : « pleins d’admiration à l’issue des événements », addition qui provient de 14b.
  • – Verset 14. avec dérision. Moïse exposé sur les eaux. Ex 1 22; 2 3, rebuté par Pharaon, Ex 5 2-5; 7 13, 22, etc.

Modération divine envers l’Égypte.

15 Pour leurs sottes et coupables pensées, qui les égaraient en leur faisant rendre un culte à des reptiles sans raison et à de misérables bestioles, * tu leur envoyas en punition une multitude d’animaux sans raison * 16 afin qu’ils sachent qu’on est châtié par où l’on pèche. *

17 Ta main toute puissante, certes, n’était pas embarrassée, – elle qui a créé le monde d’une matière informe * pour envoyer contre eux une multitude d’ours ou de lions intrépides, 18 ou bien des bêtes féroces inconnues, nouvellement créées, pleines de fureur, exhalant un souffle enflammé, émettant une fumée infecte, * ou faisant jaillir de leurs yeux de terribles étincelles, 19 des bêtes capables, non seulement de les anéantir par leur malfaisance, mais encore de les faire périr par leur aspect terrifiant.

20 Sans cela même, d’un seul souffle ils pouvaient tomber, poursuivis par la Justice, balayés par le souffle de ta puissance. Mais tu as tout réglé avec mesure, nombre et poids.

  • – Verset 15. bestioles. Le culte des animaux. « reptiles » (le crocodile, le serpent, le lézard. la grenouille), « misérables bestioles » (le scarabée), était très en honneur dans l’Égypte des Ptolémée.
  • – Verset 15. sans raison. Grenouilles, Ex 8 1-2 ; moustiques, 8 13-14; taons, 8 20; sauterelles, 10 12-15.
  • – Verset 16. l’on pèche. Cf. 12 23; 16 1; 18 4 et Gn 9 6; Jg 1 6-7; 1 Sm 15 23; 2 M 4 26; 13 8; Pr 5 22, etc.
  • – Verset 17. informe. Expression philosophique inspirée partiellement de Platon (Timée 51 A) est devenue courante à l’époque pour désigner l’état indifférencié de la matière, supposée éternelle. L’auteur n’a aucune raison de soustraire la matière à l’activité créatrice et songe sans doute à l’organisation du monde à partir de la masse chaotique. Gn 1 1.
  • – Verset 18. infecte. « une fumée infecte », litt. « une puanteur de fumée »; « puanteur » mss, versions; « grondement » texte reçu.

Raisons de cette modération.

21 Car ta grande puissance est toujours à ton service, et qui peut résister à la force de ton bras ? 22 Le monde entier est devant toi comme ce qui fait pencher la balance, * comme la goutte de rosée matinale qui descend sur la terre.

23 Mais tu as pitié de tous, * parce que tu peux tout, tu fermes les yeux sur les péchés des hommes, pour qu’ils se repentent. 24 Tu aimes en effet tout ce qui existe, et tu n’as de dégoût pour rien de ce que tu as fait ; car si tu avais haï quelque chose, tu ne l’aurais pas formé.

25 Et comment une chose aurait-elle subsisté, si tu ne l’avais voulue ? Ou comment ce que tu n’aurais pas appelé aurait-il été conservé ? 26 Mais tu épargnes tout, parce que tout est à toi, Maître ami de la vie !