AT-27 LE LIVRE DE LA SAGESSE

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Sort comparé des justes et des impies.

    3  1 Les âmes des justes sont dans la main de Dieu. * et nul tourment ne les atteindra. 2 Aux yeux des insensés ils ont paru mourir, leur départ a été tenu pour un malheur 3 et leur voyage loin de nous pour un anéantissement, mais eux sont en paix. * 4 S’ils ont, aux yeux des hommes, subi des châtiments, leur espérance était pleine d’immortalité ; *

5 pour une légère correction ils recevront de grands bienfaits. Dieu en effet les a mis à l’épreuve * et il les a trouvés dignes de lui ; 6 comme l’or au creuset, il les a éprouvés, comme un parfait holocauste, il les a agréés. 7 Au temps de leur visite, * ils resplendiront, et comme des étincelles à travers le chaume * ils courront. 8 Ils jugeront les nations et domineront sur les peuples, et le Seigneur régnera sur eux à jamais.

9 Ceux qui mettent en lui leur confiance comprendront la vérité * et ceux qui sont fidèles demeureront auprès de lui dans l’amour, * car la grâce et la miséricorde sont pour ses saints et sa visite est pour ses élus. 10 Mais les impies auront un châtiment conforme à leurs pensées, eux qui ont négligé le juste * et se sont écartés du Seigneur. 

11 Car malheur à qui méprise sagesse et discipline ; * vaine est leur espérance, sans utilité leurs fatigues, sans profit leurs œuvres ; 12 leurs femmes sont insensées, pervers leurs enfants, maudite leur postérité !

  • – Verset 1. de Dieu. C’est-à-dire sous sa protection, cf. Dt 33 3; Is 51 16; Jn 10 28-29, et sa dépendance, cf. Jb 12 10.
  • – Verset 3. en paix. La « paix » ne signifie pas seulement l’absence de tout mal, Is 57 2; Jb 3 17-18, mais un état de sécurité ou de bonheur sous la protection (v. 1) ou dans l’intimité (v. 9) de Dieu.
  • – Verset 4. d’immortalité. L’espérance, Rm 5 2+, se voit assigner un rôle capital dans la vie des justes et elle a pour objet l’immortalité, athanasia. Ce mot, inusité jusque-là dans l’A T, mais familier aux Grecs, désignait, soit l’immortalité du souvenir, cf. 8 13, soit celle de l’âme. L’auteur l’emploie ici dans le second sens, mais pour signifier l’immortalité bienheureuse dans la société de Dieu en récompense de la justice, 1 15 ; 2 23. Il précise de la sorte les espérances du Psalmiste qui ne se résignait pas à perdre par la mort l’intimité de Dieu, Ps 16 10+.
  • – Verset 5. à l’épreuve. Sur l’épreuve, pierre de touche et moyen de purification du juste, cf. Gn 22 1 ; Tb 12 13 ; Jb 1 2 ; Ps 66 10 ; 1 P 1 6-7.
  • – Verset 7. leur visite. Le mot, cf. Ex 3 16+, désigne ici une intervention favorable de Dieu, susceptible de coïncider avec un jugement général ou partiel. L’expression elle-même, qui reproduit litt. Jr 6 15; 10 15 (LXX), cf. aussi Is 24 22, indique une phase ultérieure dans la condition des âmes justes. Le verbe suivant doit signifier leur glorification définitive ; si la notion de « resplendissement » s’applique ailleurs aux élus ressuscités, Dn 12 3 ; Mt 13 43. Cette doctrine d’une résurrection corporelle ne s’explicite nulle part dans le livre.
  • – Verset 7. le chaume. Dans plusieurs textes bibliques, cf. 1s 1 31 ; 5 24 ; Na 1 10 ; Abd 18 ; Za 12 6 ; Ml 3 19, l’image symbolise les effets de la colère vengeresse de Dieu ou la revanche d’Israël sur ses ennemis. Elle est ici transposée et signifie peut-être la participation des justes glorifiés à l’extermination du mal, comme prélude à rétablissement du règne de Dieu, auquel ils sont associés (v. 8).
  • – Verset 9. la vérité. Une « vérité » qui justifiera leur confiance et leur révélera tout le dessein de Dieu.
  • – Verset 9. l’amour. Ou bien, en coupant la phrase autrement : « et ceux qui sont fidèles dans l’amour demeureront auprès de lui ». Selon la traduction adoptée, le bonheur des élus est donc fait à la fois de connaissance et d’amour.
  • – Verset 10. le juste. Ou : « ce qui est juste ».
  • – Verset 11. discipline. Formule empruntée à Pr 1 7. Le mot « sagesse » désigne la sagesse pratique qui fait vivre selon la vertu ; le mot « discipline », traduit ailleurs par « éducation » 1 5 ; 2 12, ou « instruction » 6 17; 7 14, résume les moyens nécessaires pour l’acquérir.

Mieux vaut la stérilité qu’une postérité impie.

 3    13 Heureuse la femme stérile * qui est sans tache,- celle qui n’a pas connu d’union coupable ; * car elle aura du fruit à la visite des âmes. *

14 Heureux encore l’eunuque * dont la main ne commet pas de forfait et qui ne nourrit pas de pensées perverses contre le Seigneur : il lui sera donné pour sa fidélité une grâce de choix, un lot très délicieux dans le Temple du Seigneur. *

15 Car le fruit de labeurs honnêtes est plein de gloire, impérissable est la racine de l’intelligence. * 16 Mais les enfants d’adultères * n’atteindront pas leur maturité, la postérité issue d’une union illégitime disparaîtra.

17 Même si leur vie se prolonge, ils seront comptés pour rien et, à la fin, leur vieillesse sera sans honneur ; 18 s’ils meurent tôt, ils n’auront pas d’espérance ni de consolation au jour de la Décision, 19 car la fin d’une race injuste est cruelle ! *

  • – Verset 13. stérile. La stérilité était tenue pour un déshonneur ou un châtiment, la fécondité était le signe de la bénédiction divine. À la femme stérile mais fidèle est reconnue ici une fécondité spirituelle.
  • – Verset 13. coupable. Litt. : « qui n’a pas connu la couche dans l’infidélité ». L’auteur envisage avant tout le cas d’une Juive fidèle, mariée à un Juif fidèle, conformément aux prescriptions de la Loi. Il écarte donc non seulement l’adultère et la fornication, cf. He 13 4. mais aussi les relations conjugales à l’intérieur de mariages mixtes, Dt 7 3; Esd 9 1-2.
  • – Verset 13. des âmes. Var. de nombreux mss lat. : « de leurs âmes » ou « des âmes saintes ». – Cette « visite » doit être la même que celle mentionnée au v. 7.
  • – Verset 14. l’eunuque. L’eunuque était exclu de l’assemblée cultuelle d’Israël, Dt 23 2, mais Is 56 3-5 avait annoncé sa réhabilitation au temps messianique, s’il observait fidèlement la Loi de Dieu. L’auteur prolonge et transpose ici ce dernier texte.
  • – Verset 14. du Seigneur. C’est-à-dire dans le ciel, Ps 11 4; 18 7; Mi 1 2-3. etc.; Ap 3 12; 7 15, où l’on partage la société de Dieu.
  • – Verset 15. l’intelligence. L’intelligence » désigne le sage discernement des vrais biens qui fait vivre selon la vertu et assure la conformité aux exigences divines, cf. 4 9; 6 15; 7 7; 8 6, 18, 21. C’est une racine stable. Pr 12 3. et féconde, portant des fruits pour l’éternité, 1 15 ; 2 23.
  • – Verset 16. d’adultères. Dans l’usage biblique, le mot « adultère » est appliqué à Israël ou aux Israélites infidèles à Dieu, cf. Is 57 3: Jr 9 1; Ez 23 37; Os 3 1. On peut donc l’entendre de Juifs apostats ou de Juifs ayant contracté mariage avec une partie païenne, cf. 13+, et non pas seulement des adultères au sens précis du terme. Cf. encore 4 3,6.
  • – Verset 19. est cruelle. Dans ce développement (cf. déjà v. 12) sur le sort misérable d’une descendance impie, l’auteur rejoint des motifs bibliques anciens : les parents sont punis dans leurs enfants et ceux-ci, rendus solidaires dans le mal et le châtiment (cf. pourtant Ez 18 14-20), mourront soudainement ou ne connaîtront pas une vieillesse honorable (cf. pourtant Jb 21 7-33). La perspective d’un jugement sévère, v. 18, lorsque Dieu décidera en dernier ressort, rend le tableau plus sombre encore. Cf. 4 3-5.